À deux pas des bâtiments de la RTBF, à Bruxelles, Mme Valérie Lacour, pharmacienne, a ouvert sa pharmacie du nom de «Pharmacie Square Levie» voici 9 ans. Sa volonté affirmée a été de s’investir autour du concept de soins pharmaceutiques.
«Il s’agit d’un modèle de pratique centré sur le patient et concerté avec les autres prestataires de soins. Il vise à promouvoir la santé, prévenir la maladie ainsi qu’initier, suivre et évaluer les traitements médicamenteux afin d’en assurer l’efficacité et la sécurité. Le but est d’optimiser la qualité de vie d’un patient et de lui permettre d’obtenir des résultats thérapeutiques positifs pour des coûts réalistes.»
Un parcours enrichissant
Pour elle, le pharmacien doit être «l’accompagnant du patient pour prendre soin de sa santé, sans optique commerciale.» Pour mener au quotidien un travail de qualité, elle a construit une équipe sur mesure: «Nous sommes 4 pharmaciennes, dont deux temps plein. Chacune a une expérience et sa propre personnalité, mais nous avons toutes la même motivation.»
Son parcours lui a aussi permis d’enrichir son métier en dehors de l’officine: «Ma vie professionnelle a été incroyable. Je suis sortie en 1994 de l’UCL. J’ai été engagée là où j’avais fait mon stage, puis j’ai travaillé dans une officine bruxelloise. Avec nos deux enfants, nous sommes ensuite partis en France pour le métier de mon mari pendant 2 ans.» À son retour, elle s’est investie dans la formation: «J’ai recommencé en travaillant un jour en pharmacie. Parallèlement, la Société Scientifique des Pharmaciens Francophones (SSPF) cherchait un remplacement pour une formatrice. J’appréciais le volet scientifique de la démarche. Déjà durant mes études, j’étais étudiante chercheuse. Après ce remplacement, la SSPF m’a gardée et j’ai continué à donner des formations pour les assistantes et les pharmaciens.»
La transmission
Cette volonté de partage de savoir s’est poursuivie: «En 2010, l’UCL m’a contactée pour venir coanimer des séminaires pour les étudiants en pharmacie. Benoit Mousset, responsable des stages à l’UCL, donnait aussi le cours de pratique professionnelle. Ce cours se donne en dernière année et permet de faire le lien entre la pratique des soins pharmaceutiques (le vécu en stage) et la théorie accumulée jusque là. J’ai ressenti le besoin de valider le dispositif pédagogique que j’avais construit et j’ai donc entrepris un master complémentaire de 2 ans en pédagogie universitaire (cours en soirée et le week-end).»
Prendre le temps pour les patients
En 2015, le moment était donc venu d’envisager de reprendre une pharmacie: «C’était mon rêve, je ne voulais pas avoir de regrets et tenais à mettre en pratique mes idées. Je voulais une petite pharmacie, qui me permette de suivre chaque patient. On entend souvent que reprendre une pharmacie de moins d’un million, ce n’est pas rentable. Je ne suis pas d’accord, c’est trop restrictif, car cela dépend vraiment de l’ensemble de son projet.»
Son aspiration à la qualité et au soin du patient a mis quelques semaines à convaincre les patients: «Au début, ils ne comprenaient pas toujours notre façon de travailler: toutes nos questions, nos analyses… Mon but est d’accompagner le patient pour qu’il prenne soin de sa santé. Cela signifie agir pour la prévention, prendre le moins possible de médicaments, et quand ceux-ci sont nécessaires, veiller à ce qu’ils soient pris correctement (gérer les interactions, éviter les doublons, trouver avec le patient le meilleur moment de prise, soutenir sa compliance…).»
L’évolution du métier rencontre pleinement sa manière de travailler: pharmacien de référence, BUM, revue médication, vaccination… «Je pense que pour les revues de médication, par exemple, le principal obstacle reste que le patient doit comprendre à quoi elle lui sert. Il faut du temps pour changer les mentalités, on avait eu ce problème au début des BUM asthme.»
Le contact avec les médecins
Sa philosophie ne change pas: «Pour prendre soin de la santé des patients, notre concertation avec le médecin est cruciale! Pour les revues de médication, nous avons décidé de prendre le temps: deux pharmaciennes par patient concerné pour parcourir toute sa médication. La partie analyse (schéma de médication, DPP, compliance, effets indésirables potentiels, pathologies existantes…) prend minimum une heure. Après, l’échange avec le patient prend trois quarts d’heure à une heure. Il y a ensuite le remplissage de l’e-form et la rédaction d’un rapport, qui est alors envoyé au médecin traitant. Nous attendons ensuite son retour ou le rappelons, avant de faire un feed-back au patient. Nous avons un retour très positif des patients à propos de cette démarche.»
Le contact avec les généralistes évolue aussi: «Soit nous avons des généralistes qui ne réagissent pas (on doit courir derrière et c’est beaucoup de temps perdu pour nous), soit nous avons des médecins très heureux de travailler avec nous à une vision à 360° du patient. Chaque fois que ça fonctionne, le patient est vraiment gagnant!»
Un conseil aux jeunes pharmaciens
Avec son expérience, Valérie Lacour donne un conseil aussi aux jeunes pharmaciens: «Ils ne doivent pas hésiter à aller vers l’officine, parce qu’aucune journée ne se ressemble. Nos missions auprès des patients comportent aussi un important volet social et une approche familiale.»
Elle est consciente que les horaires d’ouverture des pharmacies sont lourds et figés: «En officine, il est possible d’aménager son temps de travail, de construire son projet à mi-temps ou à trois-quarts temps. Les jeunes pharmaciens ne doivent pas hésiter à dialoguer avec les pharmaciens titulaires pour trouver le meilleur mix. Par contre, les contraintes doivent être partagées, il est nécessaire d’être respectueux des deux côtés. Pour moi, le principal objectif devrait surtout être de s’intégrer dans une équipe avec un projet qui valorise les compétences acquises pendant leurs 5 années d’université.»
Derniers commentaires
Lula KAPEMA
23 septembre 2024Belle perception de notre profession ,composée surtout de passionné(e)s.
Des professeurs " visionnaires " ( Cfr Messieurs Fils,Roland, Roberfroid,Moens ,Dumont, et tous les autres)nous avaient bien préparé à affronter les réalités du terrain.
Entretemps, partout les sociétés ont évolué... le pharmacien belge s'adapte, toujours prêt à affronter de nouveaux défis....